« Soyez dans la joie du Seigneur, soyez toujours dans la joie, le Seigneur est proche.» (Ph 4, 4.5)
Dimanche, le 13/12/2020
Le troisième dimanche de l’Avent est appelé « Dimanche de la joie ». La joie en est le fil conducteur, elle traverse toute la liturgie. Dans la première lecture (cf. Is 61, 1–2a.10–11), en réponse à l’annonce du prophète qui se présente comme « consacré par l’onction » et « envoyé » par le Seigneur auprès de son peuple, Israël livre une réponse enthousiaste: « Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu ». Quant à Paul, il exhorte les Thessaloniciens à être « toujours dans la joie » (cf. 1Th 5, 16–24). Les 2 lectures sont jointes par un extrait du « Magnificat » (Lc 1, 46b-48.49–50. 53–54), ce cantique de joie de Marie en réaction aux paroles élogieuses de sa cousine Elisabeth. L’évangile, lui, montre Jean le Baptiste accomplir joyeusement sa mission de précurseur.
Dans un dicton du Haut-Uélé (République Démocratique du Congo), le bien-être ou la joie est souvent comparé au « cou d’un termite séché », c’est-à-dire très fragile. Considéré sous cet angle, cet appel à la joie semble une provocation. Comment, pourrions-nous objecter, être dans la joie au milieu d’une crise de covid-19 qui affecte notre vie dans ses diverses dimensions (humaine, socio-politique, culturelle, économique, etc.) ? Il se développe alors, un peu logiquement, ce que le Pape François, dans son livre interview Dieu est jeune, appelle la maladie « du visage funèbre » (p. 43) ou « le sens de l’échec », qui a pour conséquence de nous transformer « en pessimistes mécontents et déçus au visage assombri » (La joie de l’Evangile, n. 85). D’autre part, on trouve aussi « de ces gens bourrus et hargneux qui s’imaginent que pour être sérieux, il faut prendre le visage de la mélancolie, de la sévérité, et traiter les autres (…) avec rigidité, dureté et arrogance », fait remarquer le Pape dans son livre interview.
Comment accueillir alors l’invitation de la liturgie de ce dimanche dit de la joie ? Dans Isaïe, le peuple à peine rentré de l’exil à Babylone vit difficilement, des obstacles se dressent devant lui, les perspectives ne sont guère optimistes. Mais la seule annonce du prophète suscite chez lui l’allégresse. Paul, dans sa mission très courte, a été chassé de Thessalonique et la communauté locale souffrait de la persécution : l’appel à la joie dans ce contexte n’était-il pas synonyme de « pure résignation », comme pour dire que « ça pourrait aller » ? Isaïe, dans une sorte de « parabole de la semence », affirme que « le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations ». A remarquer que le verbe est au futur. Saint Paul se sert aussi du futur pour étayer son appel : « tout cela, il le fera ».
Les deux s’appuient sur la fidélité de Dieu maintes fois expérimentée dans l’histoire du salut. « Il est fidèle, Celui qui vous appelle », argumente Paul. Autrement dit, Dieu ne trompe pas, quand Il donne sa parole, Il la maintient toujours. Le deuxième argument en faveur de la joie à cultiver quelles que soient les circonstances, nous le trouvons dans la bouche de Marie : Dieu se penche vers les petits, dont Il se constitue Ami ; « Il comble de biens les affamés (…), se souvient de son amour ». Dans le contexte de l’Avent, la célébration de la Nativité est plus que proche : la promesse du Sauveur, qui s’identifiera intimement aux petits, est à quelques encablures de notre position.
Dans la perspective de ce dimanche, comment être concrètement alors et toujours dans la joie ? A mon avis, les chemins pour y arriver sont 5 comme les doigts d’une main :
1. Le sens de l’humour : c’est le conseil que le Pape donne aux prêtres ; savoir rire devant les événements de la vie, rire de soi surtout quand on a tendance à se prendre trop au sérieux (cf. Dix choses que le Pape François propose aux prêtres en Italien, 63–68) ;
2. Etre soi-même, c’est-à-dire comme Jean le Baptiste (cf. Jn 1, 6–8.19–28), savoir se définir comme on est réellement : « Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : redressez le chemin du Seigneur » ;
3. Avoir foi en la fidélité de Dieu, car son « sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent », chante Marie;
4. Demander cette joie à l’Esprit Saint : la joie est un fruit de l’Esprit Saint comme le rappelle bien Saint Paul ; si elle ne vient pas de lui, elle sera trop passagère (Ga 5, 22) ;
5. Etre proactifs au sens que conseille Stephen R. Covey (dans son livre Les 7 habitudes de ceux qui réalisent tout ce qu’ils entreprennent) : se concentrer aux faits sur lesquels on a un certain contrôle, que l’on peut changer ou améliorer plutôt que sur les préoccupations en dehors de notre portée. Mieux vaut agir positivement que se comporter en commentateur des faits et actions des autres.
Cultivons cette joie en nous et autour de nous. Que le Seigneur nous aide à semer la joie toujours et partout!
Abbé Jean-Florent ANGOLAFALE (Rome)